La Crinière Blonde, blog de réflexions équestres.
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Septembre, c'est la rentrée. Et à l'heure où beaucoup en profitent pour entamer de nouveaux projets, j'en clôture un. La Crinière Blonde, c'est fini. Et si j'ai tant tardé à annoncer ce que vous pouviez deviner après 9 mois d'inactivité, c'est parce que c'est une décision qui a été difficile à prendre et encore plus à annoncer. Le dire publiquement, c'est rendre ça réel. C'est qu'il n'y aura plus de retour en arrière. Et même si je suis sûre de moi, j'ai quand même une petite boule dans la gorge en tapant ces lignes.

La Crinière Blonde, ça a été une formidable aventure. Au départ, un tout petit blog sur lequel je passe des heures à écrire avec passion pour un résultat, il faut le dire, médiocre. Un nom à coucher dehors, aucun esthétisme, peu de vues et quelques commentaires parfois incisifs. Mais au milieu de tout ça émerge un petit lectorat intéressé par la direction que je prends et qui m'aide à préciser ma ligne édito. J'en veux plus, je rêve plus grand. J'efface tout et je recommence. C'est la naissance de la Crinière Blonde, qui grandira avec moi durant 7 ans.

Ce projet, c'est mon bébé, ma fierté, ma passion ! Je me renseigne sur la mise en page d'un blog, sur les notions de balisage HTML, sur comment améliorer mon référencement. Je note toutes mes idées d'articles, je découpe des pages de magazines, je creuse, je réfléchis, je discute, je fais des millions de recherches sur le net, je lis, même des études scientifiques en anglais ! Puis je passe des heures à trier et rassembler les informations, à vulgariser, à chercher le bon ton, à raturer pour être enfin satisfaite de mon article. Je me mets la pression, je travaille tard le soir, entre les cours ou après le boulot. C'est un travail énorme, couplé à la gestion des réseaux sociaux associés. Mais j'adore le faire : écrire, c'est ma passion. Et je ressens une telle excitation à chaque publication ! J'ai si hâte de lire vos réactions et je suis si fière quand vous aimez, commentez et partagez ! C'est grisant !

Au final, La Crinière Blonde, ce sera 94 publications, des articles viraux qui feront 36 000 vues et jusqu'à 400 partages sur les réseaux sociaux, des opportunités exceptionnelles (être invitée sur des évènements, me faire des contacts professionnels), des partenariats, beaucoup d'apprentissages (sur les chevaux, sur l'écriture, sur le web, sur moi), de nouveaux réseaux (en particulier ma communauté Instagram que j'aime si fort !) et pleins de belles rencontres... Il y a de nombreuses fois où je me suis sentie dépassée par ce succès. Je disais plus haut que le blog a grandi avec moi, mais il a aussi grandi avec et grâce à vous, et m'a fait grandir. Merci de m'avoir accompagnée toutes ces années. Merci de m'avoir encouragée et soutenue. Merci d'avoir donné vie à ce projet. Merci d'avoir fait de cette aventure ce qu'elle est. C'était complètement fou.

Et c'est parce que je me sens si pleine de gratitude que je me devais de revenir vous donner le mot de la fin. Car si je m'attarde aujourd'hui sur la joie que m'a apporté ce blog, tout n'est pas toujours rose dans la vie. Début 2021, des événements personnels m'ont bouleversée et laissée sans énergie ni envie pour mes loisirs (d'où l'arrêt si soudain de ce blog). Et comme cela se produit souvent après un épisode difficile, cela a remis beaucoup de choses en perspective dans ma vie. Une fois le temps de la guérison venu, je me suis aperçue que le blog ne me convenait plus. Je suis arrivée au bout du chemin avec La Crinière Blonde et il est temps pour moi d'évoluer vers de nouveaux projets.
(Je mentirais en disant que les petites désillusions n'ont pas aidé à faire pencher la balance en faveur de cette décision : le revers de la médaille du succès de certains articles a été les nombreux plagiats que j'ai subi. Quand on met toute son âme dans un projet, c'est chaque fois une atteinte en plein cœur. En plus de la colère, la frustration s'en est mêlée en constatant que ces pillages étaient souvent commis par des professionnels ou des blogueurs/influenceurs plus connus que moi. Non seulement mon travail était volé, mais en plus il leur rapportait plus de succès, tandis que ma popularité stagnait.)

Le temps est donc venu pour moi de tourner la page... et de rêver plus grand. Toujours plus grand, pour qu'on ne puisse plus m'atteindre. 9 mois d'absence ici et, enfin, en pensant à la suite, mon clavier recommence à me démanger. L'envie d'écrire et de partager est toujours là. Mais je veux sortir du cocon de ce blog. Me défaire de son format limitant et adolescent. Ne plus rédiger seule dans mon coin mais vous rencontrer. Vous parler, dans tous les sens du terme. Donner une autre dimension à mon travail. Mais tout cela demande du temps. De la réflexion. De l'organisation. Des moyens. Les idées fourmillent et je les trie et les nourris patiemment.

Ce n'est donc pas un adieu, mais plutôt un au revoir.
Merci encore à vous. Merci à La Crinière Blonde pour tout ce qu'elle m'a apportée.
Peut-être reviendrai-je ici vous dire où s'écrit la suite...

En attendant, prenez soin de vous !


Marylou



Oui, je sais. Je suis très en retard sur les Easy Stories mais je suis justement entrain de préparer les articles pour nous ramener à l'époque présente (car on s'était quittés en mars 2018, ahem). En attendant, j'avais très envie de vous parler d'un évènement précis dans notre parcours : le recours au nose band. Car c'est un outil qui fait polémique, car je l'ai beaucoup décrié aussi, car ça peut sembler contraire à ma recherche de respect, de douceur et de communication dans mon équitation et que pour toutes ces raisons, il me semble d'autant plus intéressant de partager mon expérience. Encore plus dans ce contexte de montée en puissance du bien-être équin (#jaimetendrelebatonpourmefairebattre).



Un rapport au mors très difficile


Pour replanter le décor, je rappelle qu'Easy est un trotteur français réformé des courses qui non seulement a fait l'entrainement, mais aussi a été utilisé à l'AFASEC (l'école de formation des jockeys) pour apprendre aux apprentis à monter. Donc dès 3 ans, à peine débourré, il était monté par de jeunes jockeys avec une main qu'on peut imaginer pas toujours juste ni stable. Cela couplé à l'utilisation des mors de course qui peuvent être assez durs et au fait qu'on laisse les chevaux s'appuyer sur la main pour trouver leur équilibre à grande vitesse : on partait avec un début de relation au mors et à la main pas très reluisant !

Tout de suite après l'achat d'Easy en octobre 2017, j'ai programmé un rendez-vous avec le dentiste pour faire un check up et car j'avais déjà remarqué lors de son essai et de mes premières montes à la maison qu'il était très lourd sur la main et avait une bouche à la fois dure et sensible. Bonne surprise : sa bouche est saine. Mauvaise surprise : le dentiste trouve une petite dent de loup mais n'est pas sûre qu'elle gênera et comme je prévois de passer mes premiers mois à pied, on décide de ne pas y toucher pour le moment.

Après une période de repos, je décide de faire un re-débourrage qui me donne l'occasion de vérifier que filet (avec muserolle française) comme mors (double brisure à gros canons tout simple, sélectionné après plusieurs essais de mors) sont bien acceptés. Easy ne semble pas gêné, il prend son mors facilement et je fais en sorte de l'associer à des choses positives : mettre le mors pour aller en balade à pied, mettre le mors pour aller brouter, mettre le mors et avoir un bonbon... Tout semble aller comme sur des roulettes jusqu'au retour en selle en avril 2018 : je découvre un cheval qui ouvre GRAND la bouche, même sans contact sur les rênes, pour échapper à toute communication. Il secoue la tête à la moindre action de main, se montre extrêmement sensible aux demandes (réactives très vives et disproportionnées) mais en même temps, n'hésites pas à peser sur la main et à tracter. Il est très compliqué évidemment de travailler dans ces conditions (en plus de sa raideur, de sa méconnaissance des aides et de tout le reste !), sa bouche n'est vraiment pas bonne et je ne sais déterminer si c'est la dent de loup ou son passé qui est en cause. On poursuit le travail quelques temps avec une timide amélioration du contact, mais c'est lent, trop lent : je rappelle le dentiste. Au final ce n'est pas une mais deux dents de loup, dont une cassée, qui seront extraites ! Comme quoi, il faut toujours explorer finement la piste "médicale" avant toute chose : le pauvre devait être vraiment gêné... Par sécurité, je laisse donc largement passer la période de cicatrisation recommandée et en profite pour faire venir l'ostéopathe qui ne trouve rien "d'inhabituel pour un cheval de cet âge sorti des courses".

Nous revoilà repartis plus confiants et effectivement, avec la poursuite du travail, je constate de vrais progrès ! On trouve de la stabilité dans le contact au pas mais Easy continue de se braquer facilement bouche ouverte et langue dehors pour échapper à la main aux allures supérieures ou quand un exercice lui semble trop contraignant (sachant que nous ne demandions à cette époque rien de plus que de l'incurvation et des transitions, choses physiquement possibles pour lui). Et moi qui manque déjà de tact et de fixité dans mes mains ; mes défauts sont accentués par ses défenses, ce qui l'amène à tenter de s'échapper encore plus fort, ce qui me déstabilise encore plus et ainsi de suite dans un terrible cercle vicieux... Ajoutons à cela que les défenses d'Easy m'amènent parfois à une perte de contrôle un peu périlleuse quand on travaille le galop, qui est déjà un exercice très compliqué en soi pour mon petit réformé et moi qui ai encore tant à apprendre. Bref, au bout d'1 an de travail monté, il faut se rendre à l'évidence que nous commençons à stagner à cause de cette mauvaise relation au mors et de mes soucis de main. J'ai tenté la carte des soins, du travail et de la patience, mais cela ne semble pas suffisant. La mort dans l'âme, je fini par accepter de tester une solution proposée à plusieurs reprises par Coach : essayer un nose band. 

Cheval qui se défend contre le mors et refuse le contact.
De l'ouverture de la bouche malgré un contact léger à la défense franche car j'ose y toucher...




Comment le nose band a rétabli la communication


On ne va pas se mentir : j'ai vécu le recours au nose band comme un échec. Moi qui voulait prôner la douceur et la communication avec mon cheval, je me retrouvais à utiliser un outil coercitif et cache misère. J'avais l'impression d'avoir échoué dans mon travail, de trahir mes principes et de "forcer la main" à Easy. J'avais honte aussi, car c'est un outil très décrié et j'avais peur de ce qu'on pourrait penser de moi, notamment sur les réseaux sociaux où les jugements sont promptes et où les gens se construisent une image de vous parfois "idéalisée". J'allais retomber bas dans leur estime, comme j'étais retombée dans la mienne. 
Mais j'ai confiance en Coach et, bien que je sois très têtue et que j'ai parfois besoin de réfléchir longtemps aux solutions qu'elle me propose, s'il y a bien quelqu'un à qui je suis prête à laisser le bénéfice du doute en matière d'équitation, c'est elle ! On pourrait également penser que j'aurai pu persévérer plus longtemps en espérant qu'Easy ait un déclic, mais j'estime qu'1 an d'attente est une durée honorable pour tester une méthode et je reconnais sans honte avoir envie de progresser avant les 10 ans de mon cheval.

En avril 2019, me voilà donc pas très à l'aise dans mes baskets en train d'ajouter un nose band à ma muserolle. Ce n'est pas un miracle mais en quelques séances, les premiers résultats sont là : le cercle vicieux est devenu un cercle vertueux ! Easy ne peux plus ouvrir grand la bouche et sortir la langue pour échapper à mes actions de mains, il se défend alors beaucoup moins (même si ça n'empêche pas dans un premier temps qu'il soit toujours tendu des naseaux à la queue, le nose band ne réglant que le problème de surface), ce qui me permet de mieux gérer mes mains et d'avoir plus de stabilité, de précision et de douceur dans mes actions, ce qui l'incite à se poser et à écouter et ainsi de suite, nous apportant au final du confort à tous les deux ! Le nose band lui apprend aussi indirectement qu'il est plus "confortable" de céder aux demandes que d'y résister. Cela l'oblige également à m'écouter et à rétablir la communication, en attendant qu'il ai envie de prendre part à la conversation.

Malgré tout, je ne renonce pas en parallèle à trouver d'autres solutions ! C'est ainsi que je fais venir une bit fitteuse qui, malgré une consultation catastrophique qui devra se faire en 2 fois car Easy ne supporte pas qu'on lui manipule trop longuement la tête, va nous trouver un mors qui nous convient bien mieux (spoiler : le Neue Schule Team Up double brisure, anneaux coulissants et alliage décontractant) ! Je tente aussi à pied de travailler les cessions à la mâchoire/nuque pour être sûre qu'il ai bien compris l'utilisation du mors, comment il est censé y réagir et pas simplement comment le supporter (la nuance est importante !). Enfin, je fais un véritable retour en arrière sur l'acceptation de l'équipement (synonyme pour Easy de travail monté) car j'ai remarqué qu'il est tout de suite moins décontracté quand il est harnaché : je me remets à le longer avec le filet sous le licol et même à travailler à pied et en liberté en ajoutant la selle, pour lui montrer encore et toujours qu'on peut faire des choses amusantes et en restant décontracté avec le mors !

Nous faisons d'énormes progrès au travail, si marqués que je tente une première fois au bout d'environ 6 mois d'enlever le nose band : c'est mieux, beaucoup mieux qu'avant mais Easy est immédiatement plus lourd sur la main et dès que quelque chose ne lui convient pas, il coupe court à tout discussion main/bouche en retrouvant ses vieilles défenses. Je remets le nose band et nous continuons à travailler. Je change également d'ostéopathe pendant cette période et celui-ci trouve des blocages dans la mâchoire d'Easy et l'oreille droite complètement verrouillée, choses que le précédent n'avait jamais relevé en plusieurs visites ! Il constate que la manipulation de la tête est délicate (ce que j'avais déjà noté) et me fait part de ses sentiments : le rapport difficile avec le mors d'Easy provient certainement de mauvais souvenirs (mors durs dans les courses, mauvaises mains qui les utilisent, douleurs des dents de loup) mais aussi de nombreux blocages profonds sur la tête qui nécessiteront un travail de fond sur le long terme pour s'en débarrasser complètement. Mais nous avançons dans le bon sens : à chaque visite, l'ostéo arrive à aller plus loin dans ses manipulations, Easy les accepte mieux et les blocages sont moins nombreux !

Effet du nose band sur un cheval qui ne supporte pas le mors.
Les défenses ne disparaissent pas miraculeusement mais pouvoir les limiter me permettent de me poser... et lui aussi.


Enfin, après 1 an d'utilisation du nose band, je le retire en mai 2020 et cette fois-ci, cela semble être la bonne ! Easy a une bouche bavarde : il mâchonne son mors, claque des lèvres, ouvre parfois franchement la bouche pour dire quand il n'est pas d'accord ou quand j'agis mal (et il a raison !) mais tout a changé car désormais, il ne fait que s'exprimer au lieu de tout refuser en bloc ! Il est à mon écoute et moi à la sienne, nous avons un vrai échange entre mes mains et sa bouche. J'avais l'impression auparavant d'être face à quelqu'un qui hurle et ne pouvait donc pas m'entendre : le nose band m'a permis de le faire taire le temps de lui expliquer ce que je souhaite et de le raisonner. Désormais, nous parlons en selle, constamment. Ce n'est pas parfait bien évidemment, mais j'ai progressé dans l'utilisation de mes mains et lui a évolué dans sa façon de communiquer qui ne se résume plus à dire non par principe. Aussi étrange que cela puisse paraitre, c'est bien en fermant la bouche de mon cheval que j'ai pu lui redonner la parole.



Le dernier mot Jean-Pierre...


Ce parcours atypique, qui ne correspond qu'à notre expérience et ne serait pas valable pour n'importe quel couple cavalier/cheval, m'a amenée à reconsidérer le nose band. Je ne l'idéalise pas : les résultats d'aujourd'hui ne sont pas que de son seul fait mais une association avec les soins réalisés, le matériel adapté, la progression de ma monte, les exercices à pied et l'effet du temps. C'est un outil dont l'utilisation doit rester temporaire et qui ne règle que les problèmes de surface. Mais je ne diabolise plus non plus le nose band. Il reste une aide dont l'effet dépend des mains qui l'utilisent et de l'intention derrière.

Je ne culpabilise plus non plus de l'avoir utilisé car il nous a beaucoup apporté, autant à moi qu'à Easy. Je me suis rendue compte qu'il y a malheureusement un écart entre ce qu'on voudrait faire et ce que l'on peut faire réellement. Je n'avais tout simplement pas le niveau pour m'en sortir sans une aide artificielle, et il faut savoir humblement le reconnaitre. Pourquoi m'acharner à faire des fautes de mains très désagréables pour mon cheval quand au final un nose band peut le stabiliser et donc me stabiliser indirectement et me permettre de laisser sa bouche tranquille ? Parfois, certaines aides sont un véritable accélérateur et un soulagement pour le cavalier comme le cheval. Ai-je été une tortionnaire ? Peut-être aux yeux de certains, toujours est-il que nous sommes deux dans cette histoire a avoir finalement trouvé du confort et que je ne suis pas sûre que cela aurait été possible sans cette étape un peu désagréable. C'est en tout cas la leçon que je tire à ce jour de mon expérience mais comme le prouve cet article, mon avis n'a pas fini d'évoluer !





"C'est une pisseuse", "un vrai caractère de jument !", "il faut la vouvoyer" : qui n'a jamais entendu ces commentaires dépréciant les juments et les dépeignant comme caractérielles et lunatiques ? Les stéréotypes sur elles sont si nombreux et répandus ! Mais sont-ils vraiment fondés ou sont-elles victimes d'une forme de misogynie équine ? Les juments ont-elles réellement tendance à avoir plus mauvais caractère que leurs homologues mâles ? Une étude scientifique a tenté d'y répondre.



Le bon caractère, critère déterminant de l'avenir des juments


Avant d'entrer dans le vif du sujet, prenons un instant pour définir ce que nous appelons par "caractère" ; dans l'étude "Reported Behavioural Differences between Geldings and Mares Challenge Sex-Driven Stereotypes in Ridden Equine Behaviour" ("Différences de comportements relevées entre les hongres et les juments remettant en question les stéréotypes de sexe dans le comportement des chevaux montés") qui va nous servir de support, la différence est bien faite entre tempérament et comportement, qui peuvent être considérés comme les deux composants du caractère. Le tempérament désigne les réponses innées du système nerveux du cheval et, a contrario, le comportement est l'ensemble des traits de personnalités acquis tout au long de la vie au fil des expériences.

Pourquoi cette question du caractère est si importante ? Car avec le développement de l'équitation de loisir et "grand public", on recherche de plus en plus des chevaux gentils, faciles, patients, sociables qui pourront s'adapter à tout public et à toute situation. Le "bon caractère" devient un critère de sélection très important, et c'est d'ailleurs pourquoi des qualifications loisir ont été mises en place. Ce label qualité permet de distinguer les chevaux destinés au loisir ou sport amateur qui correspondent le mieux à une recherche d'équitation "plaisir, confort et sécurité". La personnalité du cheval influe donc sur la perception que l'on a de lui et de sa valeur en tant que compagnon. Cela va avoir un impact direct sur nos choix en matière de gestion, d'entrainement, de carrière et de reproduction et ce, encore plus chez les juments !

En effet, celles-ci sont réputées pour être plus délicates que les hongres (les entiers et les étalons étant écartés de l'étude car moins représentés dans les écuries). Les juments seraient difficiles, caractérielles et lunatiques. Et les chercheurs de l'école de Sciences Vétérinaires de Sydney (& co), auteurs de l'étude cités ci-dessus, ont effectivement été amenés à constater que les juments sont plus rapidement écartées de la compétition que les hongres lorsqu'on les juge difficiles, alors même qu'on prendra ce temps pour remettre sur pied et ramener au haut niveau un cheval qui a été blessé, par exemple. Les cavaliers vont également les entrainer en utilisant des méthodes de dressages plus dures et minimiser les signes de gênes ou de douleur qu'elles peuvent exprimer, en interprétant ça comme du cinéma ou comme un composant normal de leur caractère, au lieu de rechercher un problème physique ou d'éducation.
L'effet inverse peut également se produire : certains se montrent plus tolérants envers les juments, quoiqu'elles fassent, car celles-ci ne perdent jamais leur valeur puisqu'elles peuvent être converties en poulinières. Tandis que la qualité d'un hongre réside uniquement dans ses capacités sportives et son bon caractère : cela expliquerait pourquoi on s'acharnerait plus à corriger les soucis de comportements ou à entrainer les hongres pour ne pas les "gâcher".
Jument menaçante.
Kaline, seule jument de mon cœur, surnommée Morue
à cause de son amabilité au box... simple expression de son
mal-être de vivre en box fermé totalement par des barreaux.



Une vaste enquête pour comparer hongres et juments


En résumé, il y a clairement un biais dans l'approche des juments à cause de stéréotypes de genre. Leur potentiel sportif est souvent non exploité puisqu'on s'arrête à la première difficulté rencontrée en se disant qu'elle est due au fait que "ce sont des juments", ou bien parce qu'on préfère ne pas perdre de temps à essayer de les comprendre quand on peut se rabattre sur la "solution de facilité" qu'est la mise à la reproduction.

C'est sur la base de ce constat que l'étude "Reported Behavioural Differences between Geldings and Mares Challenge Sex-Driven Stereotypes in Ridden Equine Behaviour" est née et a voulu répondre à la question : y a-t-il réellement une différence notable de comportement entre hongres et juments et si oui, les juments sont-elles plus difficiles ? Les chercheurs ont donc mené l'enquête auprès de 1233 cavaliers (dont 75% pratiquent l'équitation depuis plus de 8 ans) et leurs chevaux de toutes races (de l'andalou au poney welsh, en passant par le pur sang arabe et le hanovrien). Ceux-ci ont répondu à un questionnaire en ligne composé de 151 questions (développées à l'aide d'experts tels que des vétérinaires, entraineurs, cavaliers de compétitions et chercheurs) portant sur les comportements observés chez leurs chevaux à pied et en selle pendant les 6 derniers mois. Exemples : comportement à l'attache, au moment d'être sellé, quand le cheval est face à un stimuli nouveau, quand il est séparé des autres, quand il est au box ou au paddock, quand on met ses jambes pour lui demander de galoper... Les chercheurs ont ensuite analysé les résultats en lien avec le sexe des chevaux.

Cette étude a donc l'avantage de présenter un large panel de cavaliers et de chevaux, mais présente beaucoup de variables qui peuvent fausser les conclusions : l'âge des équidés, l'âge du répondant, la race du cheval, le pays, le temps que passe chaque cavalier avec sa monture... Il faut aussi prendre en compte que jusqu'ici, peu d'études ont été menées sur ce sujet et que les résultats divergent. Il n'y a donc pas de vrai consensus scientifique autour de la question du caractère des juments, mais je trouve que cette étude mérite d'être partagée pour les pistes de réflexion très intéressantes qu'elle dégage.
A priori sur les juments caractérielles
"Les différents visages d'une jument : en colère, heureuse,
ennuyée, triste, affamée, joueuse, stressée, caline, endormie"



Caractérielles, les juments ? Qu'en dit la science ?


Je ne vous fait pas languir plus longtemps : le bilan de l'étude dénote des différences de comportement imputables au sexe du cheval dans 2 situations uniquement !
  • À l'attache : les hongres ont plus tendance à mâchouiller leur couverture et leur longe.
  • En liberté : les juments ont plus tendance à fuir lorsqu'on essaye de les attraper.
En dehors de cela, aucune différence notable entre juments et hongres n'a été rapportée dans leur comportement sous la selle ou au sol. Ou en tout cas, aucune différence suffisamment récurrente ou marquée pour être relevée. D'après cette enquête, rien ne justifie donc la réputation des juments puisqu'elles ne semblent pas manifester plus de comportements belliqueux ou être plus difficiles au travail que les hongres.

Alors, d'où vient cette croyance populaire ? Deux hypothèses sont avancées :  de la perception déformée des cavaliers ou d'une mauvaise éducation. En effet, la misogynie encore constatée dans notre société pourrait avoir été reportée dans le monde équestre : de même qu'on attend des femmes qu'elles soient toujours douces et souriantes, les juments devraient se montrer dociles et faciles sous peine d'être qualifiées de pisseuses car elles ne répondent pas aux stéréotypes de genre dominants. Il serait mal vu pour le sexe féminin, quelque soit l'espèce, de montrer du caractère et de la détermination, traits de personnalités considérés (et mieux acceptés quand ils sont) masculins. La mauvaise éducation et le renforcement involontaire de comportements jugés comme indésirables pourraient également expliquer les soucis rencontrés avec certaines juments... comportements que l'on aurait laissés passer "parce que ce sont des juments" ? Ou repris trop violemment sans chercher à réellement les corriger, jusqu'à créer de la rétivité, "parce que ce sont des juments" ?

Cependant, il y a bel et bien des différences de comportement entre hongres et jument qui s'expliquent biologiquement ! Par exemple, la fuite serait plus marquée chez les juments car c'est dans leur tempérament, c'est-à-dire inné. En effet, en troupeau, les juments ont l'habitude de se soumettre à l'étalon qui va les menacer et les mordre. Elles ont donc naturellement le réflexe de se pousser et de fuir les attitudes qu'elles jugent indésirables (attention aux cavaliers qui pourraient être perçus de la sorte !). Les hongres eux, ont plus tendance à jouer avec leur bouche : serait-ce une réminiscence des habitudes des entiers qui utilisent facilement leurs dents ? Ou des tentatives de grooming, puisque des étude ont déjà démontré que les hongres sont plus affectueux et joueurs que les juments ? Enfin, la recherche scientifique n'en parle pas, mais il me semble évident en tant que femme que les juments sont soumises aux mêmes effets secondaire que nous, liés à leur nature cyclique. Suivant la phase de leur cycle ovarien, elles peuvent subir des modifications physiologiques : changements d'humeur, douleurs physiques, gênes, baisse d'énergie... Pour preuve, nombre de propriétaires traitent leurs juments pour calmer leurs chaleurs ou soulager leurs douleurs ovariennes. Tout ceci cela a forcément un impact sur leur humeur et leurs capacités sportives, désagréments que n'ont pas à subir les hongres et indirectement leurs cavaliers.



Le dernier mot Jean-Pierre...


Le cheval a évolué et adapté son comportement en fonction des besoins de son sexe (jument ou entier). Mais l'équitation ne fait pas partie de ses besoins primaires : il n'y a donc pas de raison qu'un sexe se soit mieux adapté que l'autre à la monte et au contact humain. En plus de cet état de fait, l'étude conclue à la suite de l'analyse de son panel que rien ne prouve scientifiquement que les juments seraient plus compliquées que les hongres. Mais différentes, parfois incomprises et traitées de façon injuste, certainement ! 

L'éducation est tout de même fortement remise en cause pour expliquer la mauvaise image des juments. Ne devraient-elles pas au final être traitées comme le sont les entiers ? En leur posant le même cadre clair et constant, en prenant les mêmes précautions et en leur manifestant autant de respect ? Car la comparaison avec les hongres fausse la donne. Hongre n'est pas un "vrai sexe". L'étude évoque rapidement les effets de la castration qui modifie le tempérament et le comportement des chevaux sans s'étendre plus. Mais il semble évident qu'il est faux de comparer un cheval castré, dont l'humeur est lissée par la réduction de ses variations hormonales, à une jument qui subit ses cycles et peut donc avoir une humeur variable qui lui donne ce caractère... entier. C'est bien cela : les juments sont plus proches du fonctionnement des entiers, ce qu'oublient la majorité des cavaliers qui sont alors trop laxistes ou trop durs envers elles. Hongres, juments ou entiers : tous ont leurs particularités et doivent être traités sans a priori mais en tenant compte de leurs spécificités propres.

Enfin, il est bon de rappeler qu'une jument réellement difficile n'est pas une fatalité car le caractère n'est pas quelque chose de figé : il peut évoluer en fonction des expériences positives ou négatives auxquels le cheval est confronté, il peut être modifié par différents facteurs (mal être à cause de mauvaises conditions de vie par exemple) et il continue de se modifier avec l'âge (les chercheurs ont ainsi découvert que les jeunes juments sont moins agressives que les hongres mais que leur agressivité augmente avec l'âge tandis que celle des hongres reste la même). Il y a donc beaucoup trop de variables qui entrent en ligne de compte pour estimer que le mauvais caractère est un trait  de personnalité inné et commun à toutes les juments.













Pour aller plus loin

  • L'étude complète : "Reported Behavioural Differences between Geldings and Mares Challenge Sex-Driven Stereotypes in Ridden Equine Behaviour"
  • L'article de TheHorse qui en résume le contenu : "Study: Mares Not “More Difficult” Than Geldings"

À lire aussi sur le blog

  • Croyance ou véritable théorie : la robe d'un cheval détermine son caractère ?

Plus le temps passe et plus l'équitation semble devenir un univers sans contraste. Tout est noir ou blanc, sans nuances. On est soit pour les pieds nus, soit on ferre. On est soit pour la vie en extérieur, soit on assume son cheval au box H24. On est soit pour le mors, soit pour les ennasures. Les entre-deux semblent vus comme de la lâcheté, un refus de prendre position. Mais au milieu de toutes ces guerres de clochers, n'aurait-on pas oublié que l'équitation est justement une histoire de nuances et de finesse ? Le diable est dans les détails ! C'est la finesse des actions, la finesse des ressentis, la mesure dans les décisions qui vont distinguer un bon homme de cheval d'un mauvais cavalier. Qui vont faire la différence entre celui qui demande et celui qui exige. Entre la victoire par démission de sa monture et la victoire par adhésion.


Les extrêmes n'ont rien de bon car ils amputent d'une partie de l'horizon. Ils reviennent souvent à choisir une voie au détriment, voir au rejet, d'une autre. Or en équitation, s'il y a bien une chose que l'on apprend rapidement, c'est qu'il n'y a pas de mode d'emploi. Chaque cheval, chaque cavalier, chaque histoire est différente, unique. À partir de ce constat, il devient difficile de décider à l'avance de se fermer des portes quand on ne sait quel chemin on va devoir emprunter. On peut être pour les pieds nus et finir par ferrer son cheval. Car ce n'est pas la même chose de ferrer son cheval par automatisme ou de réfléchir à chaque option et décider de ferrer car on ne peut offrir les bonnes conditions de vie nécessaires au développement correct du pied nu. C'est cette nuance dans la prise de décision qui est importante. Car la nuance s'accompagne de réflexion, puisqu'elle correspond au choix d'un degré dans une action. La nuance s'accompagne d'adaptabilité, puisqu'elle renvoie à toute une palette de possibilités de ce nuancier.


Les nuances et la finesse en équitation ; la marque des grands cavaliers.


Si l'on veut illustrer, on peut s'attarder sur la nuance entre persévérer et s'obstiner. La ténacité induite dans la persévérance est une qualité. C'est une forme de courage qui permet de travailler sur le long terme, sans s'essouffler, pour atteindre un objectif précis. L'obstination, elle, revient à être buté. Foncer même lorsque l'on sait qu'il y a un mur en face, s'entêter dans une action alors que l'on obtient pas le bon résultat. Pourtant, il faut savoir parfois lâcher prise, abandonner une idée momentanément ou définitivement. Accepter de reculer pour mieux sauter. Si ça ne marche pas, faut-il corriger ou punir ? Deux termes qui sont souvent employés et très connotés ! Corriger veut dire supprimer erreurs et défauts en remaniant, perfectionnant quelque chose. Une manière d'accompagner et de rediriger. C'est une action positive qui vise l'amélioration et n'implique en aucun cas une forme de violence. Alors que la punition peut parfois s'y rapporter. Elle implique une sanction, une action désagréable pour celui qui la reçoit. C'est la réponse (indésirable pour celui qui est puni) à une action (indésirable pour celui qui donne la punition). L'approche est plus négative (dans tous les sens du terme). Enfin, pour éviter de recourir à cet extrême, on peut se demander si on peut empêcher ou obliger le cheval à quelque chose. Dans les deux cas, on limite les possibilités d'action. Mais quand "empêcher" se contente de rayer une seule proposition de la liste, "obliger" la roule en boule et la jette pour imposer une unique solution. Cette distinction est particulièrement importante dans l'utilisation des enrênements, qui sont si décriés. Pourtant, réfléchissons : si on saisi toujours un couteau par la lame, on finira par dire qu'il est impossible de l'utiliser sans se couper. Mais est-ce réellement l'objet ou son utilisation qu'il faut remettre en cause ? C'est la même chose avec une grande partie des aides artificielles. Les rênes allemandes par exemple, sont là pour empêcher le cheval de sortir des aides, pas pour l'obliger à se mettre sur la main. Et c'est cette petite nuance qui fait la distinction entre leur bonne ou mauvaise utilisation (la question de leur efficacité est encore autre chose). La muserolle ou le noseband sont là pour empêcher d'ouvrir grand la bouche, pas pour obliger à la garder fermée.


Ces questions peuvent sembler triviales pour certains et n'être que de simples jeux de sémantique. Mais les mots ont un pouvoir : leur connotation, parfois inconsciente, a un impact fort sur l'esprit. Ce n'est pas pour rien que la libération de la parole soigne les êtres meurtris. Les mots sont les véhicules des idées, ils structurent notre pensée. Ainsi, plus notre vocabulaire est riche, plus nous en sommes en mesure de nommer, et ainsi identifier précisément, ce qui nous traverse (émotions) et traverse le monde. Plus nous sommes capables de parler de façon nuancée, plus notre pensée l'est. Et plus le nuancier de notre esprit est large, plus nous sommes en mesure de changer de gamme pour trouver celle qui correspond à chaque cheval. Car ils ont beau tous utiliser le même vocabulaire, ils ont chacun leurs verbes irréguliers qui nous obligent à tout réapprendre et à mettre de côté nos règles si chères.



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